Des traducteurs qui se télescopent

CERTAINES traductions d'un même article de la Constitution ont provoqué des querelles byzantines entre leurs auteurs. L'ennui, c'est qu'aucun d'entre eux n'a voulu en démordre et qu'à l'arrivée les versions diffèrent du tout au tout. C'est le cas avec l'article I-36, relatif aux " règlements européens délégués " qui complètent ou modifient certains éléments de la loi européenne. Les traductions française et allemande, d'une part, anglaise et espagnole, d'autre part, prévoient des procédures parfaitement opposées.
Traduit dans la langue de Molière, l'article I-36 précise que " le règlement européen délégué ne peut entrer en vigueur que si (...) le Parlement européen ou le Conseil n'exprime pas d'objections ". Autrement dit, l'approbation d'un seul (Parlement ou Conseil) suffit à faire adopter le texte. S'il avait fallu signifier que le désaccord de l'une des deux institutions équivaut à un veto, le rédacteur' aurait du écrire : " (...) ne peut entrer en vigueur que si le Parlement et le Conseil n'expriment pas d'objections ".
Les Allemands ont retenu la même formulation que les Français. En revanche, Espagnols et Britanniques estiment, eux, que le " règlement européen délégué " ne pourra " entrer en vigueur si le Parlement ou le Conseil exprime des objections ". Cette fois, l'opposition d'un seul (Parlement ou Conseil) fait barrage au texte.
On pourrait nuancer encore, en proposant autant d'interprétations qu'il y a de pays. De quoi réconcilier toutes les susceptibilités nationales...


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